lundi 27 avril 2015

Nouveaux outils et dispositifs pédagogiques face à l'incertain, Luc Gwiazdzinski, Lyon, 4 mai 2015

Nouveaux outils et dispositifs pédagogiques face à l'incertain, Luc Gwiazdzinski,
(A)ménager autrement 3ème forum des métiers
Les métiers de l’urbain face à l’incertain
4 mai 2015 8h45 – 17h15
14 avenue Berthelot, 69007 Lyon

http://www.iul-urbanisme.fr/…/uplo…/Plaquette-Forum-2015.pdf

dimanche 26 avril 2015

Contre le projet d'abattage des arbres le long de nos routes ! Non monsieur Cazeneuve ! Notre richesse c'est aussi nos paysages !


Sauvons les arbres au bord de nos routes et protégeons nos paysages !


Le Ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a demandé un audit sur l'abattage des arbres en bord de route, pour raisons de sécurité.
En 1970, Jacques Chabin Delmas avait voulu faire la même. Le Président Georges Pompidou lui avait répondu !!!!




Lettre de Georges Pompidou, Président de la République Française 
A Jacques Chaban-Delmas, Premier Ministre, en date du 17 juillet 1970

Mon cher Premier Ministre,

J’ai eu, par le plus grand des hasards, communication d’une circulaire du Ministre de l’Equipement -Direction des routes et de la circulation routière- dont je vous fais parvenir photocopie. Cette circulaire, présentée comme un projet, a en fait déjà été communiquée à de nombreux fonctionnaires chargés de son application, puisque c’est par l’un d’eux que j’en ai appris l’existence.

Elle appelle de ma part deux réflexions : La première, c’est qu’alors que le Conseil des Ministres est parfois saisi de questions mineures telles que l’augmentation d’une indemnité versée à quelques fonctionnaires, des décisions importantes sont prises par les services centraux d’un ministère en dehors de tout contrôle gouvernemental ; la seconde, c’est que, bien que j’ai plusieurs fois exprimé en Conseil des Ministres ma volonté de sauvegarder « partout » les arbres, cette circulaire témoigne de la plus profonde indifférence à l’égard des souhaits du Président de la République.

Il en ressort, en effet, que l’abattage des arbres le long des routes deviendra systématique sous prétexte de sécurité. Il est à noter par contre que l’on n’envisage qu’avec beaucoup de prudence et à titre de simple étude, le déplacement des poteaux électriques ou télégraphiques.

C’est que là, il y a des administrations pour se défendre. Les arbres, eux, n’ont, semble-t-il, d’autres défenseurs que moi-même et il apparaît que cela ne compte pas. La France n’est pas faite uniquement pour permettre aux Français de circuler en voiture, et, quelle que soit l’importance des problèmes de sécurité routière, cela ne doit pas aboutir à défigurer son paysage.

D’ailleurs, une diminution durable des accidents de la circulation ne pourra résulter que de l’éducation des conducteurs, de l’instauration des règles simples et adaptées à la configuration de la route, alors que complication est recherchée comme à plaisir dans la signalisation sous toutes ses formes. Elle résultera également des règles moins lâches en matière d’alcoolémie, et je regrette à cet égard que le gouvernement se soit écarté de la position initialement retenue.

La sauvegarde des arbres plantés au bord des routes -et je pense en particulier aux magnifiques routes du Midi bordées de platanes- est essentielle pour la beauté de notre pays, pour la protection de la nature, pour la sauvegarde d’un milieu humain.

Je vous demande donc de faire rapporter la circulaire des Ponts et Chaussées et de donner des instructions précises au Ministre de l’Equipement pour que, sous divers prétextes (vieillissement des arbres, demandes de municipalités circonvenues et fermées à tout souci d’esthétique, problèmes financiers que posent l’entretien des arbres et l’abattage des branches mortes), on ne poursuive pas dans la pratique ce qui n’aurait été abandonné que dans le principe et pour me donner satisfaction d’apparence.

La vie moderne dans son cadre de béton, de bitume et de néon créera de plus en plus chez tous un besoin d’évasion, de nature et de beauté. L’autoroute sera utilisée pour les transports qui n’ont d’autre objet que la rapidité. La route, elle, doit redevenir pour l’automobiliste de la fin du vingtième siècle ce qu’était le chemin pour le piéton ou le cavalier : un itinéraire que l’on emprunte sans se hâter, en en profitant pour voir la France. Que l’on se garde donc de détruire systématiquement ce qui en fait la beauté !

Georges Pompidou


NB. Merci au paysagiste Eric Lenoir qui a attiré notre attention sur cette folie !

jeudi 23 avril 2015

Actions et expérimentations citoyennes et artistiques dans l’espace public. Entre néo-situationnisme et esthétique de la bricole, Conférence Luc Gwiazdzinski, 12 mai 2015,

Séminaire TERRITOIRES ESTHETIQUES, CRH / LAVUE

M. BOUCHIER – D. DEHAIS


Actions et expérimentations citoyennes et artistiques 
dans l’espace public. Entre néo-situationnisme et esthétique de la bricole

Luc Gwiazdzinski, Géographe, mardi 12 mai, salle 705
CRH/LAVUE - ENSAPVS
3-15 quai Panhard et Levassor 750013 Paris



Dans le contexte mouvant, entre « métropoles liquides » (Bauman, 2000) et « art à l’état gazeux » (Michaud, 2004), de nouvelles pratiques hybrides, associant art et espace, création artistique et production urbaine émergent et dépassent la seule mise en scène de la « société du spectacle » (Debord, 1967). 

Dans l’entre-deux et hors les murs, l’espace public devient à la fois le lieu de croisements entre les acteurs de la fabrique urbaine, la scène artistique et l’objet de nouvelles métamorphoses. Des « géo-artistes », collectifs d’artistes, d’urbanistes, paysagistes ou citoyens activistes, investissent et enchantent les temps et les espaces de nos villes et nous invitent également à imaginer une nouvelle dimension de la notion d’espace public comme « lieu du faire » dans le sens de « fabriquer ensemble », dans l‘esprit des Makers (Anderson, 2013). Leurs pratiques croisent souvent d’autres démarches et d’autres tendances émergentes qui mélangent partage, pratiques collaboratives et participation entre esthétisation de l’ordinaire et des quotidiens urbains et enchantement extra-ordinaire. Ces nouveaux praticiens urbains et ces géo-artistes ont notamment « l’espace public » et le « faire » en commun, en lien avec la culture Do it Yourself (Hein, 2012) et l’économie du partage ou collaborative.  Avec eux, l’espace public est à la fois une épreuve et un lieu d’expérimentation qui permet d’habiter au sens d’exister, c’est-à-dire de faire l’expérience de la présence en un lieu. En ce sens, ils rejoignent également d’autres mobilisations contemporaines : du Printemps arabe aux occupations potagères en passant par les zones à défendre (ZAD), les Indignados ou Occupy Wall Street. Dans ces projets, le recyclage, le modeste, le frugal, l’art de concevoir des solutions ingénieuses sont souvent mis en avant. Dans les interventions ou aux alentours, entre mobilier en palettes et disco soupe, une « esthétique de la bricole, du temporaire et du fragile » s’impose qui interroge la fabrique de la ville, la misère symbolique (Stiegler, 2003) et l’imaginaire. 


Luc Gwiazdzinski est géographe, enseignant en aménagement et urbanisme à l’Institut de Géographie Alpine (Université Joseph Fourier) de Grenoble et directeur du master Innovation et territoire (www.masteriter.fr). Chercheur au laboratoire Pacte (UMR 5194 CNRS), associé au centre inter-universitaire Mobilità e Tempi Urbani (Milan) et à l’EIREST (Paris 1 Panthéon Sorbonne) il a publié de nombreux travaux sur les questions de temps et de mobilité : La ville, 24h/24, Editions de l’Aube, La nuit dernière frontière de la ville, Editions de l’Aube, Si la route m’était contée, Editions Eyrolles. Co-fondateur du Pôle des arts urbains, il oriente notamment ses travaux sur les articulations et hybridations entre arts urbains et urbanisme. Voir notamment : De l'expérience géo-artistique à un nouveau design métropolitain. Hybridation des pratiques et esthétisation des espaces publics. Serge Dufoulon & Jacques Lolive. Esthétiques des espaces publics, 2014, L'Harmattan, pp.149-183 ; 





TERRITOIRES ESTHETIQUES est un domaine de recherches dont l’objectif est d’éclairer les enjeux ainsi que les mécanismes de fabrication esthétique des territoires. Les relations qu’entretient aujourd’hui l’ensemble des pratiques esthétiques – art public, événement, architecture, design urbain, aménagement paysager – avec l’espace public, de même que la démultiplication des musées et des événements culturels en Europe et dans le monde donnent leurs formes, leurs spatialités et leur sens à ce que nous nommons les Territoires Esthétiques. Quelle(s) valeur(s) les créateurs (artiste, architecte, designer), les objets et dispositifs artistiques, les événements culturels donnent-ils aux projets de développement urbain et territorial ? Par quels vecteurs les représentations produites acquièrent-elles leurs valeurs?

mercredi 8 avril 2015

Conférence nationale de la vie nocturne, Nantes 13 & 14 avril 2015

Conférence nationale de la vie nocturne, Nantes 13 & 14 avril 2015

La vie nocturne est aujourd’hui au cœur des attentions de nombreux acteurs qui n’ont pas forcément pour habitude de travailler ensemble : élus locaux, parlementaires, acteurs socio-économiques, du monde de la culture, universitaires, responsables de lieux, syndicats de travailleurs ou d’employeurs...
Plusieurs initiatives locales ont déjà pris corps ces dernières années pour traiter de cette question essentielle : De quelle manière pouvons-nous aujourd’hui faire cohabiter ceux qui dorment avec ceux qui travaillent et ceux qui font la fête, et même, encore plus, comment faire de la vie nocturne un atout pour nos territoires et non plus un problème à gérer?

Ces questions touchent toutes les grandes agglomérations tandis que des espaces de réflexion et de co-construction des politiques publiques (assises de la vie nocturne, conseil de la nuit...) se multiplient sur nos territoires.
C’est pour toutes ces raisons que nous installons cette « Conférence Nationale de la Vie Nocturne » : une boîte à outils au service des territoires qui a pour vocation de mutualiser les réflexions et les expériences, de permettre la rencontre d’experts, de professionnels, et d’élus pour aborder ces questions en transversalité.

Ensemble, dessinons des perspectives, des méthodologies de travail et proposons des pistes d’évolution du cadre législatif national, voir même européen!

13 avril 2015 / Ouverture : 14 h - 14 h 30 J. Auxiette, Président du Conseil Régional des Pays de la Loire /
J. Rolland, Maire de Nantes, Présidente de Nantes-Métropole /
E. Lejeune, Président du Collectif Cuture Bar-Bars - Fédération Nationale des Cafés-Cultures
Animation par Sylvain Bourmeau, producteur de l’émission « La suite dans les idées » sur France Culture.

Avertissement : Liste des intervenants sous réserve de confirmation.
Plénière « Ce qui se joue la nuit » 14 h 30 - 16 h 30
Thème : État des lieux avec des universitaires, des professionnels de la nuit, de l’urbanisme et de la sécurité qui ont pu relever les grandes évolutions des comportements et des rapports sociaux dans le cadre de la vie nocturne.
Intervenants : Luc Gwiadzinski, Géographe / Roger Vicot, Président du Forum Français pour la Sécurité Urbaine, Maire de Lomme / Maître Crusoë, Avocat au Barreau de Paris / Christophe Moreau, Sociologue / Gérôme Guibert, Sociologue des musiques populaires à la Sorbonne Nouvelle.

17 h - 19 h Ateliers simultanés

Atelier 1
Comment gérer les nuisances, entre prévention et répression, où placer le curseur ? Quelles médiations? Quels outils d’évaluation?

Thème : Quelles évaluations objectives des nuisances et quelles coopérations mettre en œuvre pour les réduire?
Intervenants : Gilles Nicolas, adjoint au Maire de Nantes / Angélique Duchemin, Agi-Son / Alexandra Siarri, Adjointe au Maire de Bordeaux / Grégoire Turkiewicz, Directeur du service prévention de la délinquance de Marseille / Laurent Messager, Café « La Perle », Nantes.

Atelier 2
Quels espaces pour la vie nocturne dans nos villes?

Thème : Nous sommes face à une équation qui semble insoluble : « Comment faire cohabiter une ville qui fait la fête, une ville qui travaille et une ville qui dort au même endroit et au même moment? » Nous voulons confronter les analyses, les expériences et les projets concrets, les problématiques liées aux activités nocturnes dans les espaces ruraux et périurbains.
Intervenants : Luc Gwiadzinski, Géographe / Jean-Luc Moudenc, Maire de Toulouse / Bernard Reynal, Président de « Bistrots de Pays ». / Christine Le Renard, « L’Art-Scène », Nantes. / « Controla Club », Madrid / Véronique Ketelaer, EFUS ( European Forum on Urban Security ), Bruxelles.

Atelier 3
Quelle offre culturelle et quelle vie nocturne pour développer l’attractivité d’un territoire?

Thème : Analyse des grands mouvements éco- nomiques entre concentration des filières et polarisation des offres. Quelle place pour la vie nocturne dans le marketing territorial?
Intervenants : David Martineau, Adjoint au Maire de Nantes / Romain Viennois, « St Christopher’s », Paris / Jean-Yves Sécheresse, Adjoint au Maire de Lyon / Benoit Careil, Adjoint au Maire de Rennes.

14 avril 2015 / 9 h 30 - 11 h 30 Ateliers simultanés

Atelier 4
Hyper-alcoolisation, insécurités, addictions : état des lieux, du fantasme à la réalité.
Thème :
Réalité des phénomènes d’hyper-alcoolisation, les nouveaux comportements addictifs, etc.
Intervenants : Christophe Moreau, sociologue / Phil Hadfield, chercheur Université de Leeds, RU / Nathalie Lancial, OFDT ( Office Français des Drogues et Toxicomanies ) - Cèdre Bleu, Lille.

Atelier 5
La nuit, la culture diffuse et infuse!
Thème : Quelle culture la nuit? Quels espaces pour la culture la nuit? Les pratiques culturelles émergentes naissent et grandissent la nuit : Accompagner, encadrer, laisser-faire?
Intervenants : Jean Blaise, directeur du Voyage à Nantes / André Cayot, Conseiller Musiques Actuelles, DGCA-Ministère de la Culture et de la Communication / Eric Lejeune, Président du CCBB / Stéphanie Thomas, Fedelima / Alexandre Tinseau, FRACAMA / Alain Gralepois, Vice-président du Conseil régional des Pays de la Loire.

Atelier 6
Du local au national, comment créer une synergie entre citoyens, professionnels et pouvoirs publics?
Thème : Comment mettre en œuvre une trans- versalité efficace, inventer de nouvelles postures, un langage et une culture commune pour mieux appréhender les problèmes autour de la vie la
Intervenants : Sandrine Mazetier, Députée de Paris / Frédéric Hocquard, Conseiller de Paris délégué à la Vie Nocturne / Benjamin Mauduit, Conseiller municipal de Nantes délégué à la nuit / Denis Tallédec, directeur du CCBB.
nuit ? Quelles subsidiarités ? Quelles réglementaires et législatives?
évolutions

Atelier 7
Économie de la nuit :
de nouvelles dynamiques et de nouvelles solutions pour un secteur d’activité qui évolue.
Thème : Les nouveaux outils économiques (BPI, ESS, etc.) qui existent et qui ne sont pas encore investis par les acteurs de la nuit.
Intervenants : Carole Le Rendu - Audencia / Laure Bomy, Fédération Nationale des Boissons / Fédération des Brasseurs / Conseil Régional des Pays de la Loire / UMIH / CPIH Synhorcat / Marc Slypper, Secrétaire national du SNAM- CGT.
Pause 11 h 30 - 12 h

Clôture 12 h - 13 h
Alain Gralepois, Vice-Président du Conseil Régional des Pays de la Loire Benjamin Mauduit, Conseiller municipal de Nantes délégué à la nuit Denis Tallédec, Directeur CCBB
Témoin :
Jean-Michel Lucas, consultant en déformation culturelle, universitaire, ancien DRAC et conseiller au cabinet du Ministre de la culture, Jack Lang.

Lieu de la Conférence :
Conseil Régional des Pays de la Loire 1, rue de la Loire,
44200 Nantes.
Entrée libre sur inscription à cette adresse : http://www.cnvn.fr Des actes de cette conférence seront publiés ultérieurement.

Sept idées pour pédaler même en périphérie des villes, Interview Luc Gwiazdzinski, Terra eco, 8 avril 2015


http://www.terraeco.net/Pour-nous-mettre-au-velo,59345.html


Sept idées pour pédaler même en périphérie des villes
Revue Terra Eco, 8 avril 2015

Permettre la traversée des parcs, supprimer les feux, réduire la vitesse… Voici quelques solutions pour rendre le parcours du cycliste banlieusard moins risqué.

Inconditionnels du biclou et pourfendeurs de la voiture, « essayez donc de passer de Saint-Ouen à Saint-Denis ! », lance Frédéric Héran, économiste spécialiste du vélo, prenant l’exemple de ces deux communes de Seine-Saint-Denis. Si vous relevez le défi, « d’abord vous allez vous faire dépasser par des semi-remorques sur le boulevard Jean Jaurès, à Saint-Ouen. Puis, vous devrez mettre pied à terre pour franchir un terre-plein, avant de vous retrouver devant un raccordement tangentiel, cette voie qu’empruntent les voitures qui sortent à toute berzingue de l’autoroute », détaille l’économiste. Loin des centres-villes, de leurs zones 30 et de leurs pistes cyclables, boulevards périphériques, bretelles d’autoroutes et voies ferrées infranchissables imposent aux cyclistes des détours, allongent leurs trajets et dissuadent finalement le banlieusard d’enfourcher sa monture pour aller au turbin.
« Rapidité, souplesse, accessibilité. » L’éloge des qualités de la bicyclette, énumérées par Pierre Serne, vice-président du Conseil régional d’Ile-de-France en charge des transports, s’applique difficilement aux territoires balafrés de « coupures urbaines  », « principal frein à l’essor du vélo en périphérie », confirme Frédéric Héran. Pour y remédier, le Club des villes et des territoires cyclables, présidé par le même Pierre Serne, organisait, le 31 mars dernier, la journée « Vélos sans coutures », une rencontre rassemblant les acteurs de la mobilité autour d’un objectif : rafistoler les villes pour inciter leurs habitants à se mettre en selle. Le travail est titanesque, mais des solutions existent.

- Construire des passerelles
« Contrairement aux Pays-Bas, la France a conçu ses infrastructures sans jamais penser au vélo », souligne Frédéric Héran. Résultat, entre 1950 et 1975, le nombre de cyclistes français a été divisé par six. Exemple frappant, « il y a encore dix ans, la Seine était infranchissable sur 50 kilomètres aux cyclistes, à moins de se mettre en danger », illustre l’économiste. Mal parti, le pays ne peut que se rattraper. « Pour éviter les coupures, il n’y a pas 36 solutions, il faut les enjamber », estime Geneviève Laferrère, présidente de la Fédération française des usagers de la Bicyclette (FUB). Telle est l’option retenue par la Communauté urbaine de Strasbourg (CUS) qui depuis 1994 investit 500 000 euros pour « traiter » une coupure par an. En 2014, la municipalité a misé plus gros, déboursant 8,5 millions d’euros pour la construction d’une passerelle enjambant à la fois l’autoroute et les voies ferrées au nord de la ville.

- Tracer des routes à vélos
A Strasbourg toujours, le maire Roland Ries dénonce un « partage inégal de l’espace très favorable à la voiture ». La municipalité projette donc de construire un réseau routier spécialement dédié au vélo. En 2020, Vélostras, un réseau vélo express, sorte de périphérique cyclable, devrait mailler toute la CUS. Egalement à l’étude à Bordeaux, « les vélos routes constituent l’une des meilleures manières de surmonter les effets de coupure », à en croire Dominique Lebrun, coordonnateur interministériel pour le développement de l’usage du vélo. « Mais ce sont des investissements très très lourds qui incombent aux collectivités et auxquelles certaines peinent à consentir », reconnaît-il. Consciente de ce coût, Geneviève Laferrère le juge néanmoins « incontournable ». « Pour l’automobile, on a déjà toutes les réponses, investir pour les cyclistes c’est réparer une injustice », estime-t-elle.

- Réduire la vitesse
Si chère soit-elle, la route à vélos ne doit pas être l’unique solution. C’est en tout cas ce qu’estime Luc Gwiazdzinski, géographe et chercheur en aménagement et urbanisme. « Soit on prend le parti de séparer les flux, de cloisonner les modes de transport, et lorsqu’on veut développer un nouveau moyen de transport on rajoute un tube. Soit on reconnaît que la ville est un lieu de frottement, un lieu d’échange, et on fait le pari de l’intelligence de la cohabitation », analyse-t-il. Pour que piétons, cycles et véhicules motorisés circulent en bonne intelligence, un seul levier a fait ses preuves : la réduction des vitesses maximales.
L’Allemagne en a fait la démonstration. « Dans les années 1980, le pays a réduit la vitesse pour éviter que les enfants se fassent écraser rappelle Frédéric Héran. L’effet immédiat mais non voulu c’est que le nombre de cyclistes a explosé », constate-t-il, plaidant pour une extension des zones 30 permettant aux cyclistes et automobilistes de rouler au diapason. Mais quid alors des zones rurales, de leurs nationales et départementales ? Bon gré mal gré, l’économiste prône alors la solution des tubes. « Au-dessus de 50 km/heure, il faut une piste cyclable », tranche-t-il.

- Convertir les autoroutes en boulevard urbain
La bête noire du cycliste, c’est l’axe tout voiture. Pour supprimer cette coupure en évitant de débourser les millions d’euros nécessaires à la construction de ponts, Frédéric Héran prône leur reconversion. « On y ajoute des trottoirs et des passages piétons, on abaisse la limitation de vitesse et l’on obtient un boulevard urbain. Les cyclistes mais aussi les piétons peuvent alors se réapproprier ces espaces. » Au risque de voir les automobilistes pester dans les bouchons ? « Non, assure l’économiste. Depuis quinze ans,on sait qu’en réduisant la vitesse, on réduit le trafic, car le vélo et les transports publics deviennent alors plus attractifs. »

- Permettre la traversée de parcs, d’hôpitaux, de zones industrielles
En plus des coupures linéaires, des surfaces entières se dérobent aux cyclistes : parcs, hôpitaux, cimetières, zones d’activité doivent la plupart du temps être contournés. L’ouverture d’un axe les traversant permet de faire gagner de précieuses minutes. « On peut aussi s’appuyer sur les voies vertes, d’abord pensées comme des aménagements touristiques, pour développer les trajets du quotidien », estime Dominique Lebrun. Ainsi, en Seine-Saint-Denis, les berges du canal pourraient constituer un itinéraire sans coupure. « Le gros problème, c’est que la ville de Paris possède certains tronçons, les neuf communes traversées et la communauté d’agglomération en gèrent d’autres, sans compter les propriétaires privés, souligne Geneviève Laferrère. Les coupures administratives rendent la prise de décision extrêmement compliquée. »

- Supprimer les feux
Aux bretelles d’autoroutes, voies ferrées et macro-coupures, s’ajoutent les feux rouges, nids de poule, interruptions de pistes cyclables et micro-coupures qui émaillent les villes et transforment les balades de santé en parcours du combattant. Le feu rouge, par exemple, « est exclusivement pensé pour la voiture, il suppose des ralentissements, des accélérations. C’est un cauchemar pour les vélos », souligne Geneviève Laferrère. La ville de Bordeaux a donc décidé d’en supprimer 150. D’autres mettent en place des « ondes vertes » réglées sur le passage des vélos à 20 km/h. « L’idée, c’est d’inverser la perspective, résume Luc Gwiazdzinski. On part du plus faible, le piéton, et on ne prend en considération la voiture qu’au dernier stade de la réflexion. »

-  Multiplier les voies à doubles sens cyclables
A vol d’oiseau, votre destination est à trois coups de pédale. En respectant le Code de la route et évitant les rues à contre-sens, elle s’éloigne. Pourtant deux panneaux et un pot de peinture suffisent à rendre aux cyclistes leur vélocité. « Les villes ont tendance à tracer des pistes allant dans le même sens que la circulation, ce n’est pas indispensable. Pour le même prix, elles peuvent installer des doubles sens cyclables » , plaide Frédéric Héran. Depuis 2010, ces aménagements sont la règle en zones 30 et les municipalités peuvent faire le choix de les généraliser. Le tout sans accroître le danger, puisque le double sens améliore la visibilité.
Pour Frédéric Héran, l’ensemble de ces aménagements, « ne fait que s’inscrire dans un mouvement historique de prise en compte des cyclistes ». Initiée aux Pays-Bas dans les années 1970, puis en Allemagne la décennie suivante, cette tendance émerge lentement en France depuis les années 1990. « Si la France a pris du retard c’est qu’elle a délaissé l’aménagement du territoire », commente Luc Gwiazdzinski. Pour mettre un terme au règne du tout voiture, il est selon lui « urgent qu’elle s’en réempare ».


Amélie Mougey